jour 44 zen restons zen



Mauvaise nouvelle alors que le réveil me sort péniblement de mes 10 heures de sommeil quotidiennes, il pleut. Et bien ! J’avais opté pour un petit déj tôt, et puisque je suis le seul à me débrouiller en jap’, et bien j’ai mis tout le mode à la même enseigne ! Tous les français à table à 6h!
On a rencontré une réunionnaise qui fait le pèlerinage aussi. Elle était là avant nous la veille et on devrait tous marcher ensemble aujourd'hui. 

 Un petit déjeuner très copieux comme d’habitude, et je suis horrifié en levant la tête de mon assiette : mes amis français ont laissé beaucoup de choses intactes. Ne pouvant pas tout finir, je me suis excusé pour eux auprès de la mamie qui s’est levé bien tôt pour tout préparer. Elle a bien vu que j’avais trouvé ça très bon, car on aurait pu remettre mes coupelles et mes assiettes dans l’armoire. Comme tous les repas jusqu’à aujourd’hui, je termine absolument tout. Il vaut mieux m’avoir en photo qu’à table m’a t’on dit. Et pourtant je suis pas photogénique pour deux ronds… 



On démarre la journée sous un ciel gris, mais pas de pluie. Le temps restera ainsi jusqu'à midi, de brèves éclaircies puis de gros nuages. Marie, de la Réunion, fière, nous explique qu’elle ne s’est jamais perdue en 80 temples. Elle ne croit donc pas à la malédiction qui traîne autour du couple d’Angers. Elle part devant, avec Katia, et je reste derrière avec Jean Michel pour parler de trucs d’homme, de vrais. L’utilisation de l’après shampoing dans les onsens ou les chaussures, par exemple. Plusieurs fois, je reprends les dames qui partaient dans une mauvaise direction, toutes absorbées par leur conversation de femmes, véritables, les voitures japonaises et les films de Jason Statham. Je me dis qu'elles ont compris qu'il fallait surveiller la route, qu’elles lèveront la tête. Je dois bien avouer que nous sommes tous fautifs.


 On se plaint du chemin pas très engageant, encore moins que les derniers jours pas franchement pittoresques pourtant. Puis, intrigué, je regarde la carte. Nous avons affaire à un plantage massif. Jusqu’au cou, qu’on était. Le vrai chemin part est nord-est, et on file sud est. Hors carte, tellement. En avant pour se rattraper. Je trouve une route, qui remonte d’un carrefour présumé pas loin, et je nous remets sur la bonne piste. Des aventures, on en aura vécu. Je me permets d’ailleurs une petite remarque alors qu’ils allaient rentrer dans un salon de thé, je rappelle que les km nous attendent, avec une belle pente en milieu de journée, ils suivent mon conseil et on avance. 



Les temples d’aujourd’hui sont beaux, particulièrement le dernier, qui me fait forte impression. Le petit sentier de montagne est royal, mis à part les marches au niveau du genou peut être. Mais l’on sent le changement de saison. Le ciel se couvre vite, et un vent froid et mordant balaye les crêtes. La marche devient indispensable pour se réchauffer, les arrêts dans les temples ne sont plus seulement des instants de bonheur et de détente. Il faut penser à se couvrir. Autre problème, la nuit tombe bien plus vite. Impossible de finir la journée après les 17 h sans lampes. 



17 heures, c’est d’ailleurs notre heure critique. Marie nous a quitté en mi journée, nous ne sommes que 3 donc, avec une réservation pour zen kappa dojo. Le nom m’a inspiré plus que le prix pour une fois, pourtant c’est tout à fait raisonnable. Le truc, c’est que les français ont reçu l’information d’arriver après 17 heures, et moi avant 17 heures. Finalement, on arrive à 17h05, sans trop le vouloir. On s’est pas fait engueuler, c’est déjà ça. Le couple est installé dans deux petites chambrettes, et moi célibataire donc encore pur, j’ai le droit de rester dans le temple zen ! 



Juste derrière Bouddha. Au top de chez top. Le repas est pris en commun, en présence du moine en charge des invités, et du cuisinier. Les français étant sous la douche, je me suis installé sur la table basse comme eux, à genou, pieds sous les fesses, mais les chevilles criaient tellement fort qu’ils ont entendu leur détresse. Ils m’ont indiqué que le tailleur était possible. Les français s’installent jambes tendues et tentent la discussion, alors que le silence régnait jusque là. 


J’ai répondu par politesse, mais je voulais faire sentir qu’il ne fallait pas, sans les vexer. C’est sûrement notre dernier repas ensemble pourtant, si par chance ils ne se perdent pas plus que d’habitude. Mais j’avais retrouvé l’envie d’être seul, dans ce lieu, à expérimenter cette forme radicalement opposé du Bouddhisme. Moi qui n’aimais pas les marchands du temple et les champs de foire, j’avais trouvé mon idéal. Retrouvé devrais-je dire, tant le zen fait partie de mes philosophies.


 J’appréciais le repas léger, qui calait à 70%, selon les principes d’un maître zen. Le verre de thé au romarin, unique. Le calme de ce moine, ses rituels, ses gestes calculés, la cérémonie de tous les instants. Cette rigueur n’apparaissait nulle part sur son visage serein. Son sourire radieux, et plein, ne saurait mentir. Son soleil brillait. Nul besoin de onsen, de viande ou de poisson, de chemin long de plusieurs centaines de km. Son chemin était intérieur. Ce n’est pas mieux, ou moins bien. Ce n’est pas la vérité ultime. C’est son chemin. Sa réussite manifestement.



Je me suis permis une heure de méditation ce soir. L’ambiance était là. Le lotus n’était pas réalisable, ni le demi lotus. Le dos ne pouvait pas être droit. Mais la volonté était là. La marche à l’extérieur n'exclut pas la marche intérieure. Là aussi, il y a des temples à découvrir, des sourires, les traces des personnes qui nous sont chères, des chemins à ne pas emprunter, des ascensions difficiles. Mais c’est une belle marche, assurément. 



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